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jeudi 27 juin 2013

Passe un ange noir - Anne Bragance

Andres Soriano est un vieux monsieur qui passe ses journées sur le banc d'un abribus. Il fait la connaissance de Milush, une adolescente rebelle de 15 ans qui prend le bus tous les matins pour aller au lycée. Les liens entre les deux personnages se tissent. A priori, tout les oppose : l'âge évidemment, et aussi la personnalité, mais des sentiments très forts d'amitié vont naître entre eux et chacun va illuminer la vie de l'autre. On rencontre aussi d'autres personnages tels que le chauffeur de bus Thouvenet, la mère de Milush et ses voisins Géraldine/Mathilde et Stéphane.

J'ai été tellement déçue par le style familier d' Anibal en dépit d'une belle histoire que j'ai eu envie de retenter un roman de l'auteure, afin d'essayer de changer d'opinion sur ce qu'elle écrit.
Ce qui est original dans Passe un ange noir est que la narration est prise en charge par chaque personnage à tour de rôle, cela nous permet donc d'accéder au point de vue de chacun (sauf de la mère de Milush qui n'est jamais narratrice, peut-être parce qu'elle est trop antipathique pour cela...). A chaque section, on change de narrateur mais il faut lire quelques lignes avant de comprendre qui parle, j'ai trouvé cela très intéressant, les premières lignes sont comme des voix brouillées qui s'éclaircicent peu à peu. Grâce à ce procédé d'écriture, les personnages sont tous bien caractérisés, par exemple, dès le début, on sent que Géraldine/Mathilde, malgré ses attitudes ridicules, éprouve un immense vide, une grande solitude. Elle est d'ailleurs le personnage qui m'a le plus touchée, sa personnalité est intéressante, elle a du mal à supporter les épreuves de la vie et ses réactions nous montrent à quel point elle souffre. Il s'agit du personnage qui a le plus de profondeur.
Dans cette histoire de rencontres, l'autre est celui qui fait naître le bonheur chez des personnages abîmés par la vie : Andres est traumatisé par ce qui est arrivé à sa sœur, Milush ne connait pas son père, Géraldine n'a pas d'enfant... Je pense que les jeunes lecteurs peuvent apprécier l'optimisme de ce roman mais personnellement, je n'ai pas été touchée, j'ai trouvé l'ensemble plutôt factice.
Concernant la langue, j'attendais un changement par rapport à Anibal. Je l'ai partiellement trouvé : le langage familier n'est plus exclusif. Chaque personnage s'exprime à sa manière : Milush utilise un langage familier, il en est de même pour le chauffeur de bus, mais Andres s'exprime généralement dans un langage courant ou soutenu. Cette variation permet de dynamiser le récit. Toutefois, je dois avouer que le langage familier de Milush, au lieu de "faire vrai", est artificiel. Quel adolescent d'aujourd'hui dit par exemple : "même la tête sur le billot, j'aurais rien moufté sur le chant du garçon noir et les confidences de grand-père Andres à propos de sa sœur." ? Cet argot dépassé ne m'a pas dérangée outre mesure mais étant très sensible à la langue, j'ai parfois été agacée.
En outre, les personnages ont parfois des réactions totalement invraisemblables, je pense en particulier aux rencontres un peu trop faciles pour être crédibles : on se croise sous la pluie et hop, on devient les meilleurs amis du monde ! Je ne savais pas que les rencontres pouvaient se faire aussi facilement, la prochaine fois qu'il pleut, je vais faire un tour dehors sans parapluie, on ne sait jamais ! On me rétorquera peut-être que l'optimisme du roman autorise ces facilités mais d'autres romans comme Profanes de Jeanne Benameur parviennent à éviter cet écueil.
Finalement, je ne suis toujours pas séduite par les romans d'Anne Bragance, pourtant, j'ai entendu des éloges sur son style, j'ai dû passer à côté... Cette auteure a écrit 37 romans mais je ne suis pas sûr de lire les 35 autres...

Voici le passage dans lequel Andres raconte sa rencontre avec Milush, nous sommes dans les premières pages du roman :

"Il y a aussi cette petite mignonne qui vient attendre sur le banc son bus pour le lycée. Chaque jour depuis la rentrée, nous bavardons un peu, nous faisons connaissance, nous nous apprivoisons. Le premier matin, après qu'elle s'est présentée, je lui ai demandé :
- Milush, c'est quoi ce prénom ?
Comme elle n'a pas la langue dans sa poche, la petite a répondu du tac au tac :
- Et Andres ? Vous croyez que c'est mieux ? Vous pourriez pas vous appeler André comme tout le monde ?
J'ai dit que depuis le temps, j'étais habitué à Andres, et que j'y tenais. Elle m'a rétorqué qu'elle n'avait que Milush à ma disposition. Il fallait que je m'en contente.
Voilà comment les présentations se sont faites entre la gamine et moi. Un peu vives quant au ton, mais faites. Elle, quinze ans et quelques poussières de semaines. Moi, pas loin des soixante-dix-huit. Je pourrais être son grand-père et même son arrière-grand-père : un drôle d'attelage que nous formons tous les deux."

2 commentaires:

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